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Emmanuel Mozas





Travail d’étude et de recherche de

Maîtrise de psychologie clinique





















Sous la direction de Jean-Bernard CHAPELIER







Université de POITIERS

Année Universitaire 2002-2003




PLAN:


INTRODUCTION p1


  1. La musicothérapie un espace thérapeutique spécifique p3

A/ Groupe et Musicothérapie : p3

  1. Présentation du groupe, la première séance p3

  2. Les premières séances et la mise à l’épreuve du cadre p9

  3. Bleger : le cadre et la partie psychotique de la personnalité p14


B/ L’émergence d’une problématique du groupe : p15
  1. La rivalité de Daniel p15
  2. François dans son rapport à la médiation p19
  3. Pam et le rapport à la « Mère » p21

  1. Un espace spécifique mais déterminé p23

A/ L’impact du changement de cadre : p23

  1. Le déménagement p23

  2. Histoires p25


B/ La fonction du groupe dans l’institution : p28

    1. Le groupe pris dans l’institution p28

    2. Le groupe, héritier de l’institution p29

C/ Désir des soignants dans le groupe à l’heure actuelle : p32

I.Institution et couplage p32

  1. Le groupe, l’œdipe et l’intertransfert p34



  1. La psychose face au déterminisme institutionnel p36

A/ L dialectique du « déterminisme institutionnel » p36

  1. Hypothèse et définition p36

  2. Contraintes institutionnelles p38


B/ Une institution abandonnique p40

  1. La thématique de l’abandon et sa reprise au niveau de l’institution p40

  2. La reprise de cette thématique chez Daniel p41

  3. « L’homologie fonctionnelle » entre l’institution et la pathologie traitée p45




CONCLUSIONS p48


BIBLIOGRAPHIE p50

REMERCIEMENTS p51




Introduction

Cette recherche que nous abordons ici propose de retracer notre première approche de la clinique, suivant l’expérience d’un an d’un groupe de musicothérapie composé de patients « psychotiques déficitaires », selon les termes de Misès, au sein d’une unité de longs séjours.

Nous envisagerons les interactions entre le groupe, la pathologie et l’institution. A travers les processus mis en œuvre au cours des séances, nous nous attacherons à l’analyse de l’influence de l’institution sur le cadre du groupe. Cette démarche suppose d’une part, que le groupe est considéré comme un lieu spécifique de l’institution, que ce soit par ses caractéristiques ou son fonctionnement. C’est à dire que la singularité de son cadre lui confère un statut particulier. D’autre part l’institution, cadre du groupe, semble de même déterminante, par son histoire, du fonctionnement de ce groupe. Nous supposons que les changements n’ont pas été sans influer sur les fonctionnements des membres de l’institution. En dernier lieu, nous pensons pertinent de dresser un parallèle entre l’institution et la pathologie qu’elle traite, du point de vue de la répétition de fonctionnements. Nous faisons l’hypothèse que le cadre du groupe se définit non pas par différenciation de l’institution mais par détermination de celle-ci.

Nous proposons de définir le cadre suivant deux dimensions, relatives au concept de « cadre-dispositif » de Roussillon. Le cadre comprend le dispositif, (temps, lieu…) lié à la mise en œuvre de la technique de musicothérapie, fonction des règles de l’institution. Il contient aussi les soignants, leur formation et la théorie afférente. Le cadre est le support du processus et le conteneur des relations à l’intérieur du groupe.

Considérant le groupe de musicothérapie, de structure semi-fermée (acceptant simplement la rotation de stagiaires chaque année), nous dégagerons tout d’abord son organisation intrinsèque relativement à la pathologie des patients dont nous tenterons de vérifier qu’elle détermine le cadre dans une certaine mesure.

Après l’expérience des premières séances, nous définirons la spécificité du cadre, relativement à la pathologie des patients. Nous préciserons l’analyse, en nous appuyant sur la dichotomie entre Cadre et Processus dégagée par Bleger. Nous verrons, à partir de l’observation des patients comment le groupe inscrit son fonctionnement dans une dynamique résonnant à travers le cadre. Etant donnée la singularité du cadre, nous aborderons le niveau des relations entre le groupe et l’institution.

Nous verrons comment ce groupe s’inclut dans la dynamique de l’institution et par quels biais celle-ci peut en influencer le fonctionnement, par la répétition de son histoire.

Nous partirons de l’expérience d’un déménagement et de ses retentissements sur le fonctionnement du groupe. Puis, à travers l’histoire du groupe dans l’institution, nous verrons les exigences relatives à sa constitution. Nous aborderons alors, à travers la question de l’intertransfert, le niveau de l’implication des soignants et de ses rapports avec la problématique et l’évolution du groupe.

Finalement, nous traiterons de la question des rapports entre la pathologie et l’institution. Nous envisagerons ce dernier volet de notre réflexion en adoptant une dialectique que nous appellerons déterminisme institutionnel.

Nous illustrerons cette hypothèse par la pression exercée de l’institution sur le groupe. De même nous analyserons la reprise en écho d’un fonctionnement abandonnique de l’institution par un patient du groupe. Nous appuierons ces exemples par les théories de Pinel et de Bleger concernant une homologie de fonctionnement entre l’institution et la pathologie avec laquelle elle est sensée traiter.

Pour conclure, explicitant les liens entre ces différents niveaux d’analyse, nous pousserons plus avant l’hypothèse du déterminisme institutionnel vers une définition de la variation du cadre en termes d’interactions avec l’environnement institutionnel.


  1. La musicothérapie, un espace thérapeutique spécifique

A/ Groupe et Musicothérapie

    1. Présentation du groupe

Nous entamons notre propos par une description du point de départ de cette recherche, le groupe de musicothérapie. Une présentation de la composition de celui-ci, ainsi que le récit des premières séances, nous permettra de dégager le premier axe de l’analyse, celui du cadre du groupe. Nous traiterons ensuite de sa fonction, puis de l’intérêt de son analyse en s’appuyant sur les thèses de Bleger.

Ce groupe est constitué d’une infirmière musicothérapeute (Marie), d’un stagiaire psychologue (Emmanuel), qui est remplacé chaque année. Nous reviendrons sur leur relation dans la deuxième partie. La psychologue du service assure la supervision de ce groupe une fois par mois, voire tous les deux mois. Le groupe accueille trois patients dits « psychotiques déficitaires », notion sur laquelle nous nous arrêtons.

Ce terme correspond à l’évolution, depuis Esquirol, de la classification des oligophrénies. Cette conception faisait référence au Quotient Intellectuel très faible des patients et sous-entendait une défaillance organique ainsi qu’une carence précoce de l’environnement familial et socioculturel. Misès (1975), remet à jour cette nosographie en développant l’idée que « l’intrication des symptômes de la série déficitaire et des troubles de niveau psychotique crée un tout indissociable. »1 Il affine ce tableau clinique en soulignant « l’unité du groupe (clinique) autorisant une description de proche en proche depuis la psychose jusqu’au versant déficitaire prévalent »2. Il préconise par ailleurs l’instauration d’une relation où le patient puisse investir l’Objet sans le détruire afin d’étayer l’élaboration des mécanismes de défense dont l’absence associée aux éléments déficitaires amène au retournement direct contre soi de l’agressivité désintriquée1. Salbreux propose l’actualisation de cette notion en la définissant comme l’évolution secondaire d’une psychose généralement infantile à laquelle s’ajoute la chronicisation d’affections psychiatriques2. De ces définitions, nous retiendrons le lien étroit avec les psychoses plus « classiques » à la lumière desquelles nous abordons cette étude.

Le groupe est réuni tous les lundis matin durant 1h30 sauf exceptions dues à la modification des emplois du temps (vacances…).

Les six premières séances se dérouleront dans un local situé à l’extérieur de l’unité (mais toujours dans l’enceinte du pavillon). La salle comprend un canapé, une chaise (proche du bureau) de matelas et de deux fauteuils utilisés par les soignants. On trouve aussi un instrumentarium et un ensemble hi-fi.

A partir de la septième séance, le déménagement du pavillon entraîne un remaniement complet de l’espace : la pièce est plus petite, désormais située à l’intérieur du service donc soumise aux bruits de l’unité voisine. Il y a toujours les matelas et 3 fauteuils dont 2 sont utilisés par les soignants. On notera que les matelas sont toujours installés y compris lors de l’absence d’un patient, afin d’offrir des repères physiques permanents.

Les séances se décomposent en plusieurs phases : l’avant séance, lorsqu’on va chercher les patients. Il y a ensuite la période d’installation durant laquelle les matelas sur lesquels sont allongés les patients sont disposés, marquée aussi par quelques échanges verbaux. Un « morceau » de transition est proposé comme introduction, toujours choisi par les soignants. Se succèdent ensuite des phases de verbalisation et d’écoute de morceaux ou groupes de morceaux (phase réceptive). La séance proprement dite s’achèvera de temps à autres par une phase dite active avec l’utilisation d’instruments. La salle est finalement rangée puis les patients sont raccompagnés dans le service.

Le lieu est présenté aux patients comme un lieu d’échange possible autour de la musique, où nous pouvons ensemble mettre des mots sur ce que la musique nous fait ressentir. La règle fondamentale proscrit les violences physiques mutuelles et l’automutilation. Il est de même explicité que les temps d’écoute de chacun doivent être respectés. En effet, les morceaux écoutés sont choisis en partie par les soignants et en partie par les patients qui se voient alloués un temps pour faire écouter les morceaux de leur choix à tout le groupe. Toutefois, on a permis aux patients de pouvoir agir physiquement en leur permettant de danser et de frapper le rythme sur certains morceaux très évocateurs pour eux. Ces règles de conduite visent à canaliser l’agressivité vers l’expression verbale. Les transgressions de ces règles sont reprises par les soignants qui conduisent en même temps les patients à exprimer leurs sentiments plutôt que de les agir. L’agressivité verbale revêt un statut particulier puisqu’elle traduit l’expression de sentiments difficilement verbalisables, ambivalents voire culpabilisants, dans un respect relatif du cadre. Tous les membres font usage des prénoms. Les patients se tutoient entre eux, seul Daniel vouvoie les soignants. Les soignants vouvoient les patients, sauf Marie qui tutoie Pam, ce que nous ferons plus tard comme celle-ci semble difficilement manier le vous.

La première séance nous laisse une impression de routine, chaque rôle étant déjà attribué et chaque place définie comme les années précédentes. Le groupe nous apparaît hétérogène au premier abord.

Daniel ne tarde pas à évoquer suite à l’écoute de son répertoire actuel (T. Hasard, M. Delpech) ses fugues, ses tendances pédophiles et son intérêt pour les corps musclés et glabres.

François témoigne de ses préférences marquées pour « la grande musique » dont il reconnaît les grands compositeurs classiques. Il accepte la musique des autres et ira danser avec Pam et Marie. Il a longuement demandé une stagiaire avant que les séances ne reprennent et semble ne prêter aucune attention à notre présence, et s’assoupira sur la fin.

Pam est agitée, elle réclame Tri Yann, un répertoire devenu habituel depuis l’an passé, que l’ancienne stagiaire, Claire, lui a fait découvrir. Elle ne tient pas compte des règles de parole et tend à interrompre les conversations et interviendra même sur les temps d’écoute des autres. Depuis la fin de l’année dernière, elle a adopté la position assise (sur la chaise) plutôt que couchée à côte des deux autres patients.

Suite à ces premières impressions nous allons, au vu des dossiers, décrire un peu plus les pathologies des patients : Daniel 40 ans, présente une déficience intellectuelle légère et un langage pauvre et stéréotypé. Sur le plan psychique, on note des délires à thèmes mégalomaniaques et corporels à tendance pédophile. « Il présente de plus une carence affective qui se traduit par une dépendance à l’autorité qui le materne. S’ajoutent des problèmes d’identification aux imagos parentales. » Selon le diagnostic, il s’agirait d’une « psychose avec troubles de l’identité sexuée, de l’identité corporelle, manifestations délirantes et mécanismes interprétatifs voire hallucinatoires de type persécutifs. » « Le Surmoi semble ne pas avoir été intériorisé et les contraintes qu’il en reçoit sont perçues comme venant de l’extérieur. A l’extérieur de l’institution, vécue comme protectrice, il est pris d’angoisse. Nous verrons quelles réactions il a eu face au départ du médecin (prescripteur) et face aux dysfonctionnements qui ont suivi. Abandonné, il a été élevé par un membre éloigné de sa famille qui est décédé dans son adolescence. Il porte réellement un prénom mixte. Il se plaint de son physique, s’intéresse à la chirurgie esthétique et à la musculation. Il a été traité pendant plusieurs années par injection d’hormones pour pallier une insuffisance testiculaire. Daniel cherche à atteindre « un ailleurs inaccessible » souvent identifié aux Etats Unis. Dans ses relations, il décrit un balancement entre la toute puissance e l’impuissance, ce que nous verrons à travers ses projections à l’intérieur du groupe. Il a connu des épisodes hallucinatoires à l’origine de ses fugues. Selon ses dires, il part pour aller voir les jeunes (qui n’ont pas de poils) mais, comme il a peur une fois à l’extérieur, il revient à l’hôpital ou se rend au commissariat pour qu’on le ramène. Il a déjà été interpellé par la police lors de ces fugues comme il marchait les bras écartés (les coudes dans l’axe des épaules) pour impressionner et ne pas être agressé. Il est revendicateur et entreprend beaucoup de démarches pour quitter l’hôpital. D’autre part, il a été fait l’hypothèse d’une « fixation à une pulsion partielle » qui signerait une note perverse dans son organisation psychique. Nous conserverons simplement l’idée d’un lien à une organisation prégénitale infantile de l’appareil psychique. Nous ne nous attarderons pas sur ces composantes que nous aborderons plutôt du côté du paradoxe psychotique. Le Rorschach met en avant des défenses du côté de l’inhibition et nous verrons plus loin comment il use de l’identification projective et du déni. Il écoute habituellement de la musique dans le service, seul (1 à 2h par jour) et a commencé les séances en groupe de musicothérapie en 1995. Dans ce groupe, il adoptait un comportement de leader et stimulait le groupe.

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