DE CARVALHO Silvia
Année de Maîtrise
(2003-2004)
"Stress et adaptation chez l'enfant d'âge scolaire
(7-12 ans) : impact du placement en institution"
Résumé
Le placement d'un enfant en institution a lieu lorsque des dysfonctionnements familiaux risqueraient d'entraver son développement (maltraitance, alcoolisme des parents, carence affective ou de soins). Afin d'étudier l'adaptation de l'enfant en rupture familiale et dans un contexte de placement, dans une perspective développementale, nous avons rencontré 40 enfants âgés de 7 à 12 ans, répartis en deux groupes : 7-9 ans (enfants) et 10-12 ans (enfants proches de la pré-adolescence).
Pour étudier les effets du stress induit par le placement et la séparation chez les enfants, sur les plans émotionnel et comportemental, nous leur avons administré des échelles concernant l'estime de soi (ETES), les stratégies de coping (Kidcope) et l'anxiété (STAI-C).
D'après les résultats relatifs aux différentes échelles, les enfants rencontrés maintiennent une estime d'eux-mêmes à peine au-dessus de la moyenne, utilisent le coping évitant comme principale stratégie d'adaptation, et présentent une anxiété quotidienne et une anxiété au retour de week-end fortement élevées.
En conclusion, les enfants connaissant un stress précoce induit par des dysfonctionnements familiaux sont amenés à développer des troubles de l'adaptation au niveau émotionnel et comportemental. Cependant, une décision de placement, bien qu'induisant un stress au départ du fait de la séparation d'avec la famille, représenterait une fonction réparatrice, apportant à ces enfants ce dont ils manquaient jusqu'à lors, à savoir une contenance, un sentiment de sécurité, une stabilité. Soulignons également la grande capacité de résilience de ces enfants, qui semblent s'adapter au stress induit par ce contexte de placement.
Mots clefs : stress, adaptation, enfant, famille, dysfonctionnement, placement, séparation, estime de soi, anxiété.
Sommaire
1.2/ Lien d'attachement défaillant : répercussions chez l'enfant 12
1.2.1/ Dimension psychique 12
1.2.2/ Dimension relationnelle et conduites sociales de l'enfant 14
1.2.3/ Dimension de l'apprentissage 15
1.3/ La séparation 17
1.3.1/ La séparation mère-enfant 17
1.3.2/ Les séparations imposées par le contexte 19
1.3.3/ Séparation et carences 22
1.3.4/ Séparation imposée par l'institution 30
2/ Décision de placement 31
2.2/ Qui décide ? 33
2.3/ Population ciblée par le placement 35
2.4/ Les raisons d'un placement 37
2.4.1/ Enfants et parents alcooliques 37
2.4.2/ La maltraitance 39
2.4.3/ Abus sexuels envers les enfants 41
2.4.4/ Psychose de la mère : l'identification chez l'enfant 43
2.5/ Le placement 45
2.5.1/ Le placement en institution 45
2.5.2/ Le placement familial 49
3.2/ Réactions de l'enfant 53
3.2.1/ Les atouts d'un placement 53
3.2.2/ Les limites 55
3.3/ Coping, anxiété et estime de soi 57
3.3.1/ Stress et adaptation 58
3.3.2/ L'anxiété 63
3.3.3/ L'estime de soi 68
4/ Problématique et hypothèses 74
II/ METHODE 75
4/ Hypothèses opérationnelles 89
5/ Analyse statistique 91
III/ RESULTATS 92
1/ L'ETES 93
1.1/ Description des résultats du groupe des enfants les plus jeunes
(de 7 à 9 ans) 93
1.2/ Description des résultats du groupe des enfants les plus âgés
(de 10 à 12 ans) 95
1.3/ Analyse comparative entre les deux groupes d'âge 98
2/ Le Kidcope 106
2.1/ Description des résultats du groupe des enfants les plus jeunes
(de 7 à 9 ans) 106
2.2/ Description des résultats du groupe des enfants les plus âgés
(de 10 à 12 ans) 107
2.3/ Analyse comparative entre les deux groupes d'âge 109
3/ La STAI-C 114
3.1/ L'anxiété trait 114
3.1.1/ Description des résultats du groupe des enfants les plus jeunes
(de 7 à 9 ans) 115
3.1.2/ Description des résultats du groupe des enfants les plus âgés
(de 10 à 12 ans) 115
3.2/ L'anxiété état 115
3.2.1/ Description des résultats du groupe des enfants les plus jeunes
(de 7 à 9 ans) 116
3.2.2/ Description des résultats du groupe des enfants les plus âgés
(de 10 à 12 ans) 116
3.3 Analyse comparative entre les deux groupes d'âge 116
3.3.1/ L'anxiété trait 116
3.3.2/ L'anxiété état 118
3.4/ Comparaison entre les deux échelles d'anxiété 120
CONCLUSION 138
BIBLIOGRAPHIE 140
INTRODUCTION
Selon l'art.371-2 du code civil, "l'autorité appartient aux père et mère pour protéger l'enfant, dans sa sécurité, sa santé et sa moralité. Ils ont à cet égard droit et devoir de garde, de surveillance et d'éducation." Ainsi, dès le début de sa vie, l'enfant tisse un lien privilégié avec ses parents, ceux-là même qui ont pour rôle de lui donner les bases de son développement : il s'agit du lien d'attachement entre les parents et son enfant qui prend appui sur les soins qu'ils lui prodiguent, l'affection et le sentiment de sécurité qu'ils sont sensés lui apporter.
Cela dit, bon nombre de familles connaissent une importante dégradation de leurs conditions d'existence, génératrice d'isolement, de déstabilisation et donc parfois de maltraitance de toutes formes. Les difficultés des parents à assumer leur responsabilité éducative proviennent souvent d'une série de difficultés économiques et sociales (chômage, logement, marginalisation) et/ou personnelles (stress, conflits conjugaux, problèmes de santé mentale).
De fait, la cellule familiale, premier environnement dans lequel évolue l'enfant, mais aussi premier centre d'apprentissages et d'interactions, peut aussi parfois être source de nombreux dysfonctionnements, dans lesquels enfant et parents se retrouvent enlisés. Il peut s'agir de maltraitance, d'abus sexuels, d'alcoolisme ou de pathologie des parents, de carences de toutes sortes venant se greffer aux difficultés quotidiennes telles qu'une situation de chômage, de grande précarité du noyau familial.
D'autres situations encore peuvent être vécues comme stressantes pour l'enfant telles que vivre le divorce des parents, faire face au deuil, être hospitalisé ou bien encore être placé en institution. Ce sont autant de situations socio-familiales mal vécues par l'enfant qui sont susceptibles d'entraver un bon développement psycho-émotionnel, comportemental ou relationnel et de ce fait, son adaptation au quotidien et dans la société.
Cependant, certains enfants montrent une capacité de résilience face aux événements vécus, parvenant à y faire face plus aisément, répondant à l'adversité de façon plus appropriée, en se rattachant à un substitutif à valeur positive ou à des projets.
Depuis ces dernières années, l'institution familiale traverse une crise identitaire marquée par le remaniement de ses structures (concubinage, divorces, monoparentalité, familles recomposées) et par la redéfinition des rôles parentaux et des modes de relation qui s'ensuivent entre les générations. Dans ce sens, la considération des familles révélant des dysfonctionnements et leur prise en charge, ainsi que celle des enfants, a évolué au cours du temps.
Pendant longtemps, pour les familles à grande précarité, le droit d'aimer et d'élever ses enfants était difficilement accordé.
Dans les années 60, on plaçait les enfants pour des raisons de précarité (logement insalubre, surpeuplé…), mots qui cachaient les véritables raisons comme une carence éducative, le chômage, ou l'alcoolisme des parents, les jugeant incapables de comprendre.
Mais la protection à l'enfance évolue ; il s'agit de plus en plus d'aider les familles à sortir de leur isolement social, à restaurer les liens de confiance avec leur environnement, mais aussi d'accompagner ces parents dans leur rôle éducatif en les amenant à reconsidérer leurs valeurs, leurs pratiques éducatives.
La politique familiale actuelle est donc celle d'un soutien à la parentalité. En effet, tout est mis en place dans notre Société pour aider les parents à éduquer leur enfant, par des dispositifs d'accueil (crèches, assistante maternelle et autres services de l'Education Nationale).
Si mesures d'intervention il y a, il est désormais question d'assister les parents, de les accompagner pour le bien de l'enfant et non pas de les "démissionner" ou de les déresponsabiliser de leur fonction parentale, bien au contraire. C'est "la bientraitance" des familles qui vient peu à peu pallier une condamnation des familles en difficulté, trop longtemps stigmatisées.
S'il est admis que les parents en difficulté ont besoin d'une aide et d'un soutien visant à optimiser leur rôle parental, il ne faut pas oublier que l'enfant souffre des dysfonctionnements présents au sein de sa famille et qu'il est important de prendre en compte son bien-être psychique mais aussi physique.
Ainsi, il est nécessaire d'apporter à l'enfant une aide et un cadre de façon à pallier le stress et le désarroi dont il est victime. Le placement se révèle dans certains cas nécessaire à l'enfant pour qu'il prenne de la distance par rapport à ses problèmes, afin de le protéger de l'environnement dans lequel il évolue, mais aussi de permettre à ces familles d'évoluer d'un point de vue éducatif.
L'objectif de ce Mémoire vise à observer plus attentivement ce qu'implique pour l'enfant le fait de devoir être placé en institution, loin de la cellule familiale qu'il aura connu jusqu'alors, et ainsi d'étudier plus amplement les perturbations engendrées par cette situation, le vécu de l'enfant, son ressenti et son degré d'adaptation.
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